Remettre la cathédrale au cœur de la cité

L’Ile de la Cité au milieu du 16e. Plan Truschet et Hoyau © Archives Nationales

1570. Maquette. Musée Carnavalet © Benjamin Mouton

1615. Plan Mérian © Archives Nationales

1739- Plan Turgot © Archives Nationales

Le parvis ouest de la cathédrale

Benjamin Mouton

Au Moyen-Age, un dégagement modeste
Au XIIIème siècle, au cœur de l’ile de la Cité, la cathédrale a fait sa place dans un tissu urbain très dense. Au-devant, le parvis s’étend sur 60m de largeur par 28m de profondeur, et dans son axe, la « Rue Neuve Notre-Dame » percée pour les travaux.

Au XVIIIe siècle, une place urbaine
Au milieu du XVIIIème siècle, le parvis est recomposé dans l’esprit d’une place urbaine classique. La Rue Neuve Notre Dame est encadrée par des pavillons à colonnades, dont seul celui du nord sera bâti. La profondeur du parvis est portée à 52m. Après l’incendie de l’Hôtel Dieu en 1772, la largeur du parvis atteint 80m.

Au XIXe siècle, une esplanade monumentale
Les changements radicaux seront réalisés à partir de 1865 : démolition de la Rue Neuve Notre-Dame, et dix ans plus tard, dégagement total jusqu’à la Seine. En 1874, le parvis atteint 150m de profondeur pour une largeur de 100m, et couvre une surface totale de 1,5 hectare. La cathédrale devient un « objet architectural » isolé dans un espace vide et hors de mesure.
En 2016, l’architecte Dominique Perrault lance l’idée d’un parvis revêtu de verre transparent, état ultime d’abstraction et d’isolement de la cathédrale.

Les cathédrales dans la cité
Dans les villes où, par bonheur, le parvis médiéval a été conservé, la cathédrale se découvre au débouché d’une rue peu large, bordée de maisons de 3 à 4 étages. Souvent, par la « malice d’un alignement imparfait », la rue n’est pas dans l’axe exact de la cathédrale, mais sur sa tour nord qui s‘étire dans le ciel de la rue ; au fur et à mesure de l’approche, l’architecture se devine, et par l’apparition soudaine de la prodigieuse puissance, saisit le piéton d’un extraordinaire « coup de théâtre architectural ».

Qu’apporte aujourd’hui un grand parvis de 150m devant Notre-Dame, si ce n’est une photo frontale ? Qu’apporte ensuite au visiteur sa remontée du parvis ? Rien de plus qu’un agrandissement de la même image, mais sans davantage d’émotion : le parvis dilaté a desséché l’architecture qui est devenue muette et solitaire.

Rétablissement
C’est aujourd’hui l’occasion inespérée de mettre fin à une erreur monumentale, et la restauration du parvis :

  • Par la remise à l’échelle avec celle de la cathédrale, selon une profondeur de 40/50m, stabilisée du XIIIe au XVIIe siècle ;
  • Par la restitution du « coup de théâtre architectural » et la reconstruction de l’ancienne « rue Neuve » ;
  • Par la création du musée de l’œuvre Notre-Dame, offrant enfin au public l’extraordinaire découverte de l’édifice, son histoire, son architecture, les travaux du XIXème siècle, les connaissances que l’incendie à révélées, le dépôt lapidaire.... Sans oublier les ateliers des tailleurs de pierre, charpentiers, couvreurs, verriers, ferronniers…

Ce serait un véritable défi architectural, en écho avec le tissu urbain traditionnel, sans rupture avec la cathédrale ni concession aux modes et tendances de l’architecture internationale, et qui montre ce qu’une architecture du début du XXe siècle peut réussir avec bonheur, dans la réconciliation de la cathédrale avec sa ville.
C’est un objectif ambitieux, et il faut souhaiter que le concours, récemment projeté par la ville de Paris, puisse apporter les réponses appropriées à l’échelle et aux enjeux du monument et du site urbain.

Milieu 18e. © Archives Nationales

1750 © Archives Nationales

1867. Début de démolition rue neuve © Archives de la Ville de Paris

Dégagement jusqu’à la Seine © Archives de la Ville de Paris

1912. Carte postale

2000 © Google

Projet Dominique Perrault © Centre des monuments nationaux